Markus Lüpertz et Luis Marsans ou le Temps retrouvé de Yerres

 

Yerres ou les plaisirs du « temps retrouvé » ! L’année 2019 a été marquée, à la propriété Caillebotte de la ville, par deux expositions événement auxquelles Bien en place a assisté : « Markus Lüpertz » (13 avril – 8 septembre 2019) et « Luis Marsans. Le temps suspendu » (19 septembre – 17 novembre 2019.

Retour sur deux univers artistiques pluridisciplinaires caractérisés par une veine expressionniste ou poétique offrant au regard une promenade sensorielle captivante.

 

Expression et figuration au fil de l’œuvre de Markus Lüpertz

 

Avec une cinquantaine de peintures, des dizaines d’œuvres sur papier et des bronzes répartis dans le parc de la villa Caillebotte, l’exposition « Markus Lüpertz » a offert un remarquable aperçu du travail de cet artiste allemand qui, depuis les années 1960 et avec une multitude de matériaux et supports, contribue à enrichir toujours plus avant l’art expressionniste figuratif. Loin des modes abstraites ou du pop art de l’ère contemporaine, l’artiste privilégie un dialogue avec les formes et les figures les plus classiques de l’histoire de l’art, qu’il se plaît à déconstruire et à reconstruire en une série de jeux créatifs où le rapport au corps et à la sensation est surinvesti.

En variant les échelles, en grossissant des fragments de corps ou encore par le recours à la couleur, il explore le potentiel expressif de la sculpture. Son monumental Homme qui marche prolonge un topos classique (Rodin, Giacometti…), tout en lui conférant une dimension héroïque comme s’il s’agissait d’écrire une mythologie moderne.

De même ses peintures exacerbent la puissance pulsionnelle de la couleur, redoublée par un sens du mouvement qui leur confère une indéniable dimension spatiale. D’autres séries, déployant un univers aux tonalités gris taupe, vert foncé ou jaune-verdâtre, mettent en scène des jeux de superposition, d’opposition ou de synthèse formelle, comme si le champ de la peinture devenait un terrain de rencontre sismique propre aux glissements sémantiques.

 

L’équipe de Bien en place a eu le plaisir de rencontrer l’artiste, au style et à la personnalité inimitables, et d’assister au vernissage, qui a rencontré un très grand succès public en présence notamment du maire M. Olivier Clodong, de Mme Valérie Dupont-Aignan, directrice de la Propriété Caillebotte et de Dominique Renonciat, déléguée à la culture. La galeriste et amie de Markus Lüpertz, Suzanne Tarasiève, était aussi présente à cette belle et inoubliable journée.

 

Les sirènes proustiennes de Luis Marsans

L’automne est une saison qui s’accorde à merveille avec l’œuvre poétique de Luis Marsans, qui fut précisément présentée à partir de septembre à l’Orangerie de la Propriété Caillebotte. Façades d’immeubles, fenêtres et barrières, dans ses dessins sur carton ou sur papier, mettent le spectateur face à un seuil protégeant une douce intimité; intimité que d’autres de ses créations révèlent, comme ses dessins érotiques à la touche rodinienne étonnante.

Telles des natures mortes, bouquets et compositions florales se détachent sur un fond de partition musicale, manière pour le peintre d’orchestrer une synesthésie, une rencontre fusionnelle entre les arts chantée par Baudelaire puis explorée par Marcel Proust. Le dialogue entre Luis Marsans et À la recherche du temps perdu fait surgir une floraison d’images poétiques où les couleurs pastels et l’équilibre de la composition invitent à une rêverie paisible. Il en va de même pour ses magnifiques paysages vénitiens, nimbés d’une lumière propre à diluer les contours et à prolonger les fantasmatiques perceptions proustiennes. Il faut enfin signaler le très beau catalogue de l’exposition, avec une introduction de Marc Fumaroli et un rappel, par Juan Manuel Bonet, du parcours singulier de Luis Marsans qui n’aura cessé de se frotter à une multitude d’univers et d’influences diverses, du surréalisme à Nabokov en passant par Munch, comme poussé par la recherche de cette essence des êtres et des choses par le prisme de l’art, quête qui fut aussi celle de Proust, son alter ego devant l’éternel.

Ilona Orel, Raphaël et Jean-Baptiste Chantoiseau, Katya Solotsinskaya au vernissage de l’exposition « Luis Marsans. Le temps suspendu », le 18 septembre 2019.

 

La rédaction de Bien en place.

 

 

 

Laisser un commentaire