Le festival de Cannes 2017 a démarré sur les chapeaux de roues pour l’association BIEN EN PLACE. Après une première montée des marches pour la cérémonie d’ouverture, tout en danse et en élégance, place sur scène aux « Fantômes d’Ismaël » d’Arnaud Desplechin, visiblement ravi et ému. Après « L’en-deçà des images » paru en 2014 chez Champ Vallon, nous avons promis à Arnaud un nouveau chapitre critique à l’occasion de ce long-métrage dans lequel le réalisateur renoue avec ses thèmes de prédilection : dédales d’un scénario en cours d’écriture et mises en abyme multiples, retour d’un passé fantomatique, dédoublements, impossible deuil… le tout servi par un casting à la hauteur. La version longue du film, déjà dans les salles (notamment au cinéma du Panthéon) permettra de compléter ce palimpseste placé sous l’aile libérée de Lacan, oiseau de malheur paranoïaque ou alouette propre à inspirer au cinéastes des fantasmes qui captivent l’auditoire. Le film ressemble de fait à un rêve éveillé, où les êtres réapparaissent sur un coup de théâtre et sur un coup de vent, dans une plage isolée où l’on se croirait, à tort, à l’abris de tout trouble. Les souvenirs et les mirages se multiplient. Carlotta (Marion Cotillard), très tôt disparue de la vie de son mari Ismaël, scénariste et réalisateur de profession (interprété par Mathieu Amalric), refait soudainement surface alors que celui-ci tente une nouvelle aventure conjugale avec Sylvia (Charlotte Gainsbourg). Le film n’est pas sans évoquer l’univers de Bergman par la cruelle violence des sentiments déployés et le dédoublement identitaire. Mais on pensera aussi à Antonioni : la disparition, la dérive du couple, la liberté dans le cadrage et la manière de filmer. Une œuvre séduisante, donc, et une belle entrée en matière cinématographique pour ce Festival ainsi placé sous une bonne étoile. Les fantômes de l’image se sont ensuite transformés en fantôme de chair pour une série de rencontres enchanteresses ou inattendues : Jessica Chastain, Adrien Brody, Victoria Abril, Vincent Pérez, Sandrine Kiberlain, Sandrine Bonnaire, Elsa Zylberstein, Julianne Moore, Fleur Pellerin, Christian Estrosi… Et pour cet amour là, merci, et « Chapeau bas » comme le chantait Barbara !