CANNES 2023 – Coup de cœur d’Esther Heboyan : « Perfect Days » de Wim Wenders

Perfect Days de Wim Wenders, l’événement à Cannes pour raconter la vie ordinaire à Tokyo

Pour la projection de sa fiction Perfect Days, Wim Wenders (déjà présent avec son documentaire Anselm sur le peintre allemand Anselm Kiefer) était heureux de retrouver sur le tapis rouge du Palais des Festivals l’équipe du film tourné avec des acteurs japonais en langue japonaise. Protocole oblige, en haut des marches attendent Thierry Frémaux et Iris Knobloch.

Wenders est accompagné de sa femme Donata Wenders, tout en rouge, qui a également contribué au film. Face auxphotographes et entrainée par la musique, l’actrice AoiYamada, très blonde, coupe au carré, robe de star bouton d’or, bouge, danse, secoue la tête comme un personnage d’anime. L’autre actrice, Arisa Nakano, chevelure brune attachée, longue robe blanche avec des motifs roses cueillis d’un sakura, pose ou avance discrètement. Les hommes, eux, en smoking et nœud papillon, se veulent avenants, sourient, s’encouragent. Le nœud papillon qu’arbore Wim Wenders ressemble à une mini sculpture post-moderne qui lui va bien.

Co-écrit avec Takuma Takasaki, le scénario procure à Koji Yakusho un rôle magnifique que l’acteur interprète avec énergie et subtilité, celui de Hirayama, un technicien de nettoyage des toilettes publiques dans le quartier de Shibuya à Tokyo. Le quotidien de l’homme vieillissant est monotone, ingrat, mais l’homme s’accorde le plaisir d’arroser ses plantes, de photographier les arbres, de se détendre au sento ou bain public, de s’absorber dans un roman de William Faulkner. On souhaite à Koji Yakusho de recevoir le prix d’interprétation car il offre ce qu’un acteur peut offrir de mieux – un jeu convaincant de simplicités et de nuances. En ce sens, PerfectDays devrait être projeté dans les classes d’art dramatique. Certes, le cinéma international a son DiCaprio, a eu son Johnny Depp et son Gérard Depardieu. Mais Koji Yakushopropose ici ce qu’on aimerait voir plus au cinéma, des riens imprégnés d’une vérité transcendante.

Le long-métrage de Wenders mérite aussi un prix, et pourquoi pas une Palme d’or ? L’aspect quasi documentaire de PerfectDays n’est pas sans poésie. La bande-son, qui débute avec Perfect Day de Lou Reed, raconte l’histoire de Hirayama qui, lui, ne parle guère. Et les séquences de rêve en noir et blanc, flottements métamorphiques dans le style de Stan Brakhage, nous laissent à la lisière d’un récit qui s’écrira encore et encore, entre amorces et ellipses.

Esther Heboyan

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