Mois: Mai 2025

Palmarès 2025 de BIEN EN PLACE – le top 10 !

A quelques heures du verdict, voici les coups de cœur de Bien en place pour ce 78e festival de Cannes ! Beaucoup de bons et de très bons films cette année, parfois inattendus. Si les favoris ont pu décevoir (Eddington, Die my love, The Phoenician Scheme…), bien d’autres longs-métrages ont créé la surprise voire l’événement.

N°1 : Jafar Panahi, Un simple accident

Un film extrêmement réussi pour ce réalisateur longtemps emprisonné en Iran. De cette expérience douloureuse, il a su tirer la matière d’un scénario subtile, parfois métaphorique, qui souligne les traumatismes d’une société. Brillant et notre Palme assurément.

N°2 : Mascha Schilinski, Sound of Falling

Présenté en début de compétition, ce film est resté gravé dans nos mémoires. Il présente les destinées de 4 générations de femmes en Allemagne, dans une ferme. Les cadrages, l’esthétique, qui transforment les êtres en œuvres du passé, le travail sur le son et la sensibilité qui sourd de toutes les images en font un vrai bijou porteur de sens.

N°3 : Mendonça, L’Agent secret

La fin très réussie et émouvante du film nous a convaincus. Le réalisateur revisite le genre du policier tout en introduisant une fascinante galerie de personnages. Il parvient à interroger la mémoire et l’histoire de son pays à partir le destin d’un être hors normes et de son fils.

N°4 : Julia Ducournau, Alpha

Contrairement à ce que l’on a pu lire ou là, le film est loin d’être une déception. Le trio des acteurs – Golshifteh Farahani, Tahar Rahim et Melissa Boros – est bleffant ! Avec l’esthétique prononcée et personnelle qu’on lui connaît, Julia Ducournau porte un regard acéré sur le monde qui nous entoure, entre épidémies, délitement des familles et dureté des rapports sociaux.

N°5 : Olivier Laxe, Sirât

La rédaction est plus divisée sur ce film, qui occupe de fait une position médiane dans le classement. Il faut reconnaître, quoi qu’il en soit, la force des images de ce long-métrage apocalyptique qui rassemble un père et un fils cherchant leur fille/sœur avec un groupe de marginaux amateurs de rave party et qui naviguent dans le désert marocain. Belle réflexion sur une humanité en perdition.

N°6 : Richard Linklater, Nouvelle vague

Belle surprise que cette plongée, en noir et blanc, dans le making off du film culte A bout de souffle de Godard. Le collectif d’acteurs est remarquable et le scénario comme le montage procurent un rythme haletant, au plus près de la création. Une vraie pépite.

N°7: Bi Gan, Résurrection

Ce film chinois, annoncé à la dernière minute en compétition, est un véritable OVNI. L’auteur retrace l’histoire du 7e art, avec un démarrage reprenant l’esthétique du muet et ses cartons. Puis le récit filmique évolue, comme la vie, comme les rêves. La mémoire d’un être jusqu’à sa mort y est interrogée de manière très poétique et puissante. Une pépite.

N°8 : Olivier Hermanus, The History of Sound

Paul Mescal et Josh O’Connor forment un duo très émouvant et convaincant. Le film aborde la difficulté et la délicatesse d’une relation homosexuelle interdite dans l’Amérique profonde du début du siècle dernier. A ces destins, s’ajoutent une union autour d’une passion pour la musique, les chansons populaires et leur collecte. Un très joli film qui ne force pas les choses et se distingue par le doigté de son réalisateur.

N°9 : Joachim Trier, Sentimental Value

Une grande fable cinématographique à la Bergman et un jeu savamment orchestré entre vie privée et création au sein d’une famille tourmentée, dont la maison est l’emblème. Mise en scène très réussie et actrices au sommet.

N°10 : Hayakawa Chie, Renoir

Une petite fille singulière fait de Renoir un film inclassable. Ce long-métrage déroute, avec un goût pour l’au-delà et le divinatoire. La jeune actrice est stupéfiante et le récit d’une inquiétante étrangeté qui nous ravit.

Film bonus : la surprise des frères Dardenne

Nous avions été déçus par leurs derniers opus mai avec Jeunes Mères, les frères Dardenne signe un film touchant, vivant, avec un collectif d’actrices très attachant et un scénario qui force moins les choses.

11 films du Festival de Cannes pour BIEN EN PLACE au 17 mai 2025

11 films vus par l’équipe de BIEN EN PLACE « so far » au 78e Festival de Cannes, dont 6 en compétition. Parmi nos favoris, « Nouvelle Vague » – plongée extrêmement réussie dans tout un pan de l’histoire du cinéma français ! – et « Sound of Falling » – superbe esthétique et les destins de 4 générations de femmes dans une ferme en Allemagne ; des cadrages et des images où l’on voit les êtres devenir des œuvres et souvenirs du passé pour laisser la roue du temps tourner. Des actrices très remarquables. Hors compétition, l’éternel « Sunshine » a été une immense joie à revoir, l’un des meilleurs rôles de Ralph Fiennes; plusieurs générations en scène là encore, dans le concert de l’Histoire.

« Sirât » aussi nous a étonnés avec ce retournement du scénario lorsqu’une première grande catastrophe se produit, prélude à une débâcle de plus en plus extrême. Saisissante fin du monde en devenir et film à l’actualité brûlante avec des images sublimes. Très touchante, dans un autre registre, « La petite dernière » d’Hafsia Herzi, qui cherche son chemin au sortir du lycée. Léa Drucker dans « Dossier 137 » est plus convaincante que jamais, malgré un scénario prenant partie pour un seul côté des protagonistes.

« Le Roi Soleil » nous a offert un scénario magistral inattendu et un montage remarquable ! « Renoir » pour son étrangeté et sa jeune héroïne vaut le détour ; tout comme « Partir un jour », manière jolie de revisiter notre passé d’adolescent des années 1990 tout en chanson. « Dalloway » de Yann Gozlan avec le voix de Mylène Farmer a fait événement et méritera aussi un article à part. On a été beaucoup moins convaincus en revanche par « Mission: Impossible » au scénario… vraiment impossible ! Vive Cannes, dont le festival n’en est encore qu’à ses premiers jours, avec de belles promesses à venir.

La rédaction de Bien en place

Conférence de Jean-Baptiste Chantoiseau à l’Institut national du patrimoine, avril 2025

« Écrit, langue et littérature : le texte comme objet de collection, à travers l’exemple des maisons d’écrivains » JOURNÉE D’ÉTUDE │ CYCLE « CE QU’EXPOSER VEUT DIRE »

« Mais les Lettres… Quoi de plus abstrait que l’activité littéraire ? Que faire voir ?1 » s’exclamait, non sans un brin de provocation, Paul Valéry, en 1937, à un moment où il réfléchissait, précisément, à un musée de la littérature qui vit le jour, cette année-là, de manière éphémère, lors de l’Exposition internationale des Arts et techniques. Comme le note Jean Davallon dans son livre « L’Exposition à l’œuvre », la première question – pas toujours évidente – qu’un commissaire, la plupart du temps, se pose est la suivante : comment présenter l’objet sélectionné de manière à mettre en évidence son immense intérêt aux yeux du spectateur ? Mais, dans le cas d’une exposition littéraire, la problématique est encore plus déroutante : que vais-je bien pouvoir montrer ?
La question qui se pose est la suivante : comment orchestrer ce « passage du lisible au visible », dont parle Alain Fleischer, tant il est vrai que, par définition, tout texte « s’expose à la lecture, non à la contemplation visuelle » ? De quelle manière rendre sensible l’activité littéraire et rendre justice au cortège d’images, à ce sentiment de liberté infinie qui s’empare de tout lecteur plongé dans les délices d’un roman inspirant ?
Cette conférence de Jean-Baptiste Chantoiseau revient sur la manière dont on peut exposer l’écrit en 2025 à travers l’exemple des 4 musées littéraires de la métropole Rouen Normandie qu’il dirige: la maison natale de Pierre Corneille, près de la place du Vieux-Marché, à Rouen ; le musée Flaubert et d’histoire de la médecine, rue de Lecat, à Rouen ; la Maison des Champs / musée Pierre Corneille de Petit-Couronne et le musée-pavillon Flaubert à Croisset-Canteleu.
Renouveau des quatre maisons d’écrivain, équilibre entre collections permanentes et expositions, introduction de dispositifs interactifs et co-construction, accessibilité, travail en réseau et politique d’acquisition dynamique constituent autant de pistes porteuses d’avenir. Il s’agit en somme de sortir le champ littéraire de son pré carré afin de l’aborder dans un cadre élargi où la culture visuelle et sonore doivent trouver leur place, tout comme les appropriations culturelles diverses et variées de la littérature par la société, particulièrement à l’heure du numérique. C’est ainsi que naîtront de fructueux dialogues entre musées, littérature, visiteurs et lecteurs, au sein d’une réelle expérience commune.